Ces protéines sont des photorécepteurs uniques initialement retrouvés chez les algues. Elles ont évolué et sont désormais également présentes chez les virus marins capables d’infecter ces mêmes algues. L'étude, publiée dans Current Biology, a été réalisée par le Professeur Oded Béjà, chercheur principal, et le Docteur Andrey Rozenberg, chercheur postdoctoral.
L'équipe de recherche du Professeur Béjà mène des projets de recherche sur les rhodopsines microbiennes, des protéines qui aident les organismes unicellulaires à récolter l'énergie lumineuse, par un processus qui ressemble à la vision animale mais qui diffère de la photosynthèse. Cette étude s'est concentrée sur les channelrhodopsines (ChRs), qui appartiennent à la famille des canaux ioniques activés par la lumière. Ce sont en réalité des rhodopsines microbiennes qui transforment directement la lumière absorbée en flux d'ions passant à travers les membranes cellulaires. Ces protéines, naturellement présentes chez les algues unicellulaires, sont utilisées en neurosciences comme le principal outil optogénétique (nouveau domaine de recherche et d’application, associant l’optique à la génétique) pour la manipulation (stimulation, inhibition, ...) précise des neurones et autres cellules excitables, grâce à l'utilisation de la lumière. L'optogénétique a provoqué une révolution dans la recherche en neurosciences et est aujourd'hui considérée comme la meilleure méthode pour activer des cellules spécifiques afin d'examiner leur impact sur le fonctionnement de l'organisme.
Les channelrhodopsines, qui ont été découvertes pour la première fois en tant que protéines d'algues vertes localisées au niveau des "ocelles" (tache arrondie servant de moyen d'intimidation sur la peau des animaux), aident les protéines à trouver des conditions de lumière optimales en pilotant leur phototaxie (phénomène par lequel des cellules se déplacent en fonction de la lumière présente dans leur environnement). Diverses channelrhodopsines ont été découvertes ces dernières années chez plusieurs algues unicellulaires ainsi que chez des organismes unicellulaires n'effectuant pas la photosynthèse.
L'équipe du Technion, qui a effectué une analyse métagénomique de l'eau de mer, a pu découvrir que les virus qui infectent les algues contiennent des gènes codant pour les channelrhodopsines. Aussi, la recherche de protéines apparentées a permis de découvrir une toute nouvelle famille de channelrhodopsines provenant d'algues vertes primitives mais également de découvrir une activité conductrice d'anions (ions chargés négativement) provenant d'algues. Grâce à des expériences électrophysiologiques, les chercheurs ont démontré que les channelrhodopsines provenant des virus et des algues fonctionnent comme des canaux conducteurs d'anions dépendant de la lumière.
Le Professeur Béjà a affirmé que cette recherche “a permis de comprendre que, initialement, les channelrhodoppsines n'étaient pas présentes dans les virus mais bien dans les algues qu'ils infectent. Par ailleurs, nous estimons qu'à un certain moment du processus d'évolution, un virus géant infectant les algues a "volé" un gène de la channelrhodopsine pour ses propres besoins. Nous émettons l'hypothèse que les virus peuvent altérer la nage de l'hôte, contrôlant ainsi ses réponses à la lumière et le dirigeant vers des endroits où les conditions de rayonnement sont favorables au virus".
L'étude est basée sur les données recueillies dans le cadre de Tara Oceans, une expédition mondiale de recherche océanique menée à bord du navire Tara pour collecter des échantillons en vue de cartographier la biodiversité marine.
Le projet de recherche a été mené en collaboration avec le Professeur Peter Hegemann de l'Université Humboldt de Berlin, en Allemagne, et son équipe.
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