La variété des intervenants montre l’étendue des secteurs de la santé touchés par l’innovation 4.0 au point d’en faire une véritable révolution sociétale. Prendre soin de son corps c’est le nourrir avec attention et précautions, c’est aussi lui donner accès à la douceur, aux soins thérapeutiques par le médicament. Le bien être, la nutrition et le soin sont essentiels au vécu.
La robotique appliquée à la chirurgie fait que les machines vont faire partie de notre vie. Cela commence et ce fait ne pose aucun problème culturel dans certains pays comme le Japon. Ailleurs, quelques professions, pour des raisons plus ou moins corporatistes, peuvent tenter de freiner ce mouvement mais le dynamisme des sociétés et les avantages de la robotique vont convaincre. Elle va s’appliquer à la réparation de l’humain atteint par l’accident ou le vieillissement. La biologie cellulaire et la prothèse connectée sont complémentaires dans l’approche thérapeutique.
Dans la cosmétique, les études montrent que certaines molécules provoquent, selon l’individu, des réponses cutanées plus ou moins importantes. Le soin de la peau va donc devenir personnalisé pour proposer la lotion adaptée à chacun. Ces études montrent aussi que les UV ont des effets négatifs multipliés en cas de pollution. Une mesure connectée en temps réel permettra de proposer une prescription adaptée. Les professions de la cosmétique en contact direct avec le public vont donc changer en profondeur.
Pour l’industrie pharmaceutique, comment aller au-delà du médicament ? Comment avoir une approche plus globale de la santé ? Le traitement du diabète fournit un exemple intéressant de ce que la technologie peut apporter comme avantages pour le patient. Par une montre connectée à une application, on peut, en temps réel, déterminer le taux de glycémie donc la dose d’insuline nécessaire. La télésurveillance sera une aide au suivi pour le médecin. L’exploration dans ce domaine en est à ses débuts et il faut encore une humilité nécessaire.
La prévention implique des contraintes individuelles. Jusqu’où seront-elles acceptées ? Passé l’âge de 20 ans par exemple, il y a perte des tissus élastiques. Allons-nous accepter après 20 ans de surveiller la perte de ces tissus pour maîtriser un peu plus le vieillissement et ses atteintes ? Ce n’est pas évident. Il faudra donc, dans bien des domaines, l’adhésion de l’individu.
Les premiers médicaments numériques font par ailleurs leur apparition. Et ce n’est pas rien. Le premier médicament connecté est un instrument de lutte contre la dépression. La R&D 4.0 est donc un secteur très important qui met le patient au centre de sa réflexion, patient qui est appelé à se prendre en charge en étant accompagné. On voit apparaître un T-shirt connecté par exemple (Cardioskin) qui intègre une application connectée de surveillance de l’activité cardiaque. Il sera commercialisé en 2018, tout à l’heure donc.
Une autre aide va apparaître également pour permettre au patient de retourner à la vie normale en dehors de l’action immédiate du médecin. De tels systèmes préventifs et thérapeutiques auront pour but d’améliorer le bien être du patient qui, même en cas de pathologie lourde, pourra rester auprès de ses proches. Cela ouvre, entre autres, des perspectives à la médecine hospitalière ambulatoire.
Dans le cardio-vasculaire, un impératif dirige le sens de la recherche : l’impératif d’agir vite. L’arrêt cardiaque provoque la mort de 50 000 personnes par an en France. Il est nécessaire d’agir en prévention mais aussi d’aider les secours qui mettent en moyenne 10 minutes pour intervenir en ville alors que le délai maximum pour réduire les risques vitaux est de 4 minutes. Il faut mettre le citoyen dans la boucle pour provoquer une action efficace. La localisation des défibrillateurs à proximité, leur gestion connectée sont possibles, liés à des personnes qui se seront signalées comme pouvant effectuer les manœuvres du sauvetage vital.
On peut imaginer aussi dans l’avenir des capteurs divers couvrant les pathologies individuelles dont le suivi des données est géré par une sorte de box santé intégrant une bonne dose d’intelligence artificielle pour le suivi des patients à risque.
La formation des professionnels de santé à ces nouvelles technologies va être primordiale. Il faut intégrer le 4.0 dans les facultés. C’est un immense défi mais la nouvelle génération est très ouverte au progrès et à l’acquisition des nouvelles connaissances nécessaires. Il existe aussi beaucoup de médecins enclins à adopter ces nouvelles technologies. Pour convaincre les autres, il faut créer des vraies innovations, pas des gadgets.
L’accumulation des data et leur traitement va améliorer la compréhension du malade et de l’action du traitement ; C’est par l’efficacité que le médecin sera convaincu de l’efficacité des nouvelles approches scientifiques et des nouvelles technologies qui les accompagneront.
La France doit donc se donner les moyens d’acquérir les data et de les traiter. La machine bien maîtrisée libérera ainsi le médecin de taches souvent lourdes qui deviendront superflues.
Il faudra cependant ne pas confondre, dans la démarche médicale, augmentation et réparation. Augmenter la quantité de vie posera en effet de nombreux problèmes sociétaux.
Médecine et nutrition sont liés de façon de plus en plus évidente pour le grand public. Cela ne date pas d’hier : « La cuisine est la servante de la Médecine » (Terence) ou « Que ton aliment soit ta seule médecine » (Hippocrate). C’était bien avant JC…..
Il est toujours admis que le cuisinier doit être une sorte d’auxiliaire du médecin et prendre en compte le résultat des recherches. Le sucre en est le meilleur exemple. Diminuer la consommation du sucre est un enjeu de santé publique. De nouvelles techniques peuvent y aider. La confiture sans sucre existe. Elle symbolise la cuisine de demain qui prendra en compte les spécificités totales de la nature portées par les produits, fruits et légumes, extraites et mises en œuvre.
Les industriels de l’alimentation vont devoir aussi prendre en compte ces nouveautés, intégrer dans leur stratégie globale les résultats de leurs laboratoires de recherche et informer le consommateur en conséquence. L’objectif de cette stratégie sera de contribuer à la santé du consommateur. Satisfaire le goût, le souvenir, nourrir la physiologie et l’énergie sans oublier les milliers de milliards de bactéries à nourrir dans le système intestinal par interaction, voilà un axe stratégique vaste ! Concevoir des aliments équilibrés en liaison avec les consommateurs par ailleurs inégaux dans la possibilité d’acquérir et d’utiliser une alimentation équilibrée, de qualité, qui préserve la santé.
Quel avenir pour l’alimentation de l’humanité ? 48 % de la production céréalière mondiale va nourrir le bétail...Va-t-il falloir pour l’homme aller vers le végétal ? Vers les micro-algues ? Vers les insectes ? A l’horizon 2050….demain...pour nourrir 9 milliards de terriens. Le soin apporté aux produits alimentaires va devoir progresser avec un packaging qui préservera mieux les qualités nutritionnelles et globales des aliments emballés. Les nouvelles technologies et notamment les nanotechnologies auront leur rôle à jouer. Il va falloir, là aussi, vaincre les craintes liées aux innovations. La réglementation et la régulation devraient permettre d’aider et de favoriser une économie circulaire réductrice de déchets.
Le 4.0 concerne aussi la mobilité connectée en milieu urbain.
Paris connaît plusieurs fois par an plus de 500 km de bouchons aux heures de pointe du matin. Le numérique va devoir modifier en profondeur les données prises en compte pour la conception des axes de circulation. La ville va se complexifier avec différents niveaux physiques de circulation dédiés à chacune des formes de déplacement. Voiture électrique, voiture autonome, drones etc. vont modifier la ville. L’industrie spatiale va contribuer pour sa part à ces changements importants par ses maîtrises technologiques dans la navigation, la détection des objets et ses capacités de miniaturisation des technologies.
Le satellite jouera un rôle essentiel dans la précision de navigation notamment pour les véhicules autonomes. Galileo et sa précision seront essentiels. Qui va être responsable juridiquement de la conduite des véhicules autonomes ? La question se pose. D’autant que le développement des 5 niveaux d’autonomie, c’est à dire l’autonomie totale est prévue pour dans 10 ans. Les interactions de données y seront considérables et les enjeux sociétaux aussi comme ce qui aboutira immanquablement aux camions autonomes sans aucun chauffeur routier…
Le développement du drone est inéluctable aussi mais il va devoir répondre à des exigences précise de sécurité et de silence. La voiture autonome va sans aucun doute permettre de régler le problème des embouteillages mais pour que tout cela fonctionne et que la quantité énorme de données traitées simultanément donne les résultats attendus, il va falloir que les protections contre les piratages de data, les détournements de camions avec leur chargement soient solides. Les avionneurs travaillent sur l’avion à un seul pilote...autrement dit l’avion sans pilote. L’usager sera l’arbitre du succès ou de l’échec de ces nouveautés.
Les assureurs et les financiers investissent beaucoup sur ce secteur avec les start-up. Les assureurs sont intéressés de manière globale car les conditions de la vie urbaine déterminent pas mal de pathologies graves comme l’asthme ou les accidents de personnes. Ils sont donc attentifs à la gestion des nouveaux risques. Avec la voiture autonome, en cas d’accident grave inévitable et détecté avant sa survenue, comment la gérer, comment choisir le ou les victimes qui vont subir le choc ? Là encore l’éthique prendra toute son importance.
L’intelligence artificielle devrait, selon les optimistes, induire un hyper-humanisme...L’assureur pourra-t-il y répondre ? Le voudra-t-il ? Ce n’est pas sûr. Il n’en demeure pas moins que la connectivité en milieu urbain, le numérique, sont importants mais moins que l’humain qui doit être la première préoccupation et le centre du travail de recherche. Les solutions alternatives de modes de déplacement, multimodales ou participatives s’appliqueront au mieux des intérêts de l’homme si elles sont conçues pour cela.
L’eau, l’assainissement sont aussi partie prenante dans la gestion connectée des flux urbains.L’impact énergétique, l’impact carbone seront gérables. Les entreprises énergétiques sont déjà habituées à gérer des quantités énormes de data et sauront s’adapter. Production, gestion, distribution d’énergie sont essentiels et le seront encore plus dans l’avenir. Une multiplicité de start-up y travaillent aussi et déclinent tous les aspects et les possibilités de gestion des data.
A l’évidence, l’avenir appartient aux synergies entre la recherche fondamentale et les industries. C’est toute une génération qui doit être préparée à cette révolution numérique. Les lois de demain viendront pour une grande partie des données traitées et analysées. La maîtrise de l’interdisciplinarité sera l’enjeu du succès des calculs massifs sur les données. 1 million d’objets connectés au km carré...Nos possibilités actuelles sont loin de ces chiffres. La 5G et l’intelligence artificielle devraient nous aider...Mais il est difficile d’imaginer avec précision ce que sera l’avenir du traitement numérique dans 15 ou 20 ans.
Pour l’essentiel, il faut bien dire que l’interface entre l’homme et les data n’existe pas encore vraiment hors le cercle restreint des chercheurs et spécialiste. Mais ce fut le sort de toutes les technologies nouvelles, de l’automobile à moteur à pétrole à l’avion. Réduire une chose compliquée à un processus simple à travers une application basique en termes de gestes coordonnés est la condition de l’acceptation de la nouveauté.
Géophysique, données médicales,, voiture autonome, communication 5G etc. sont encore du domaine du rêve et de la science fiction, pour beaucoup d’entre nous.
Pourtant, Watson, la machine d’IBM, comprend le langage naturel et comprend l’intention qu’il y a derrière la phrase...Il gère des données non structurées. L’ordinateur se dirige donc, par l’intelligence artificielle, vers un monde cognitif proche du monde humain, peuplé par le langage, la voix, le raisonnement, la reconnaissance visuelle mais aussi, et c’est énorme, par l’empathie et la gestion du savoir et de l’expérience.
Les chiffres impressionnent : Dans l’analyse de 3000 clichés de mélanomes, le taux de reconnaissance d’un mélanome malin chez un groupe de spécialistes radiologues en dermatologie est de 75 à 85 %, celui de Watson est de 95 %...Il faut apprendre à utiliser ces machines. Elles sont l’avenir. La distance entre le virtuel et le réel diminue.
Au bout, on oubliera la technologie. Et, si tout va bien, l’humain sera le grand gagnant de ce nouveau monde, avec des bénéfices très personnels, comme le montrent certains logiciels qui fonctionnent déjà : dessin en 3D sans toucher le clavier ou la souris pour une handicapée, T-shirt pour détecter l’approche d’une crise d’épilepsie et sa gestion adaptée, décoration d’une pièce en réalité augmentée. Le canapé choisi et mis en place virtuellement est éventuellement à un clic de la commande en ligne.
Une fois encore, cette année, il ressort que la science contient en elle le meilleur et le pire. Elle n’est ni bonne ni mauvaise. Ce qu’elle contient de possible offert à l’Humanité dépend seulement des hommes eux-mêmes.
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