Le suicide est une cause importante de décès en Israël et dans le monde, avec environ un million de suicides au total à déplorer chaque année, dont environ 500 en Israël.
Bien que le suicide ne soit pas une cause majeure de décès si l'on considère la population totale, il demeure la première cause de mortalité chez les jeunes de moins de 24 ans.
L'aide sociale, psychologique et psychiatrique sont des outils efficaces pour prévenir les suicides, mais ne sont appliqués que dans les cas où le problème a été diagnostiqué et où la personne suit déjà un traitement. Par conséquent, il est important d'identifier les tendances suicidaires dans la population générale. Il s'agit d'un défi extrêmement complexe puisque les informations médicales relatives à la santé mentale sont protégées par des protocoles de confidentialité et que de nombreuses personnes à risque ne cherchent pas à obtenir de l'aide.
Au cours des 50 dernières années, de nombreuses recherches ont été consacrées à l'élaboration de modèles de détection précoce des personnes présentant un risque réel de suicide. Le problème est que, jusqu'à présent, ces modèles étaient basés sur des méthodes statistiques traditionnelles et fournissaient des estimations très approximatives.
Publiée dans la revue Scientific Reports, du Nature Publishing Group, la recherche a été menée par les scientifiques du Technion, le Professeur Roi Reichart, expert en traitement du langage naturel, le doctorant Refael Tikochinski (psychologie computationnelle) et le chercheur postdoctoral Docteur Yaakov Ophir (psychologie clinique, en collaboration avec l'Université hébraïque de Jerusalem) ainsi qu'avec les scientifiques de l'Université Hébraïque, la Professeure Christa Asterhan (psychologie éducative) et le Docteur Itay Sisso (cognition et Big Data).
Les outils développés par le groupe permettent une détection précoce des populations à risque au sein de la population générale, de sorte que la détection ne se limite pas aux personnes déjà traitées pour des problèmes de santé mentale. Le système combine des méthodes de machine learning et de traitement du langage naturel avec des outils théoriques et analytiques issus du domaine de la psychologie et de la psychiatrie, et utilise des réseaux de neurones multicouches.
Selon le Professeur Reichart, "Nous comprenons maintenant que la détection des tendances suicidaires ne peut pas dépendre uniquement des expressions explicites de détresse indiquant par exemple un désir de mourir, ou des dossiers médicaux officiels tels que les scanners cérébraux, les évaluations psychiatriques et autres données médicales. Les tentatives de prédiction des tentatives de suicide basées sur des données démographiques, psychologiques et médicales n'ont pas été particulièrement fructueuses malgré cinq décennies de recherche intensive. Nous avons donc compris que nous devions aborder le défi simultanément et sous différents angles".
Le Docteur Ophir a expliqué que l'idée de cette recherche est née suite à la mort tragique de David-El Mizrachi, un jeune de 16 ans qui s'est suicidé parce qu'il avait été victime de harcèlement et cyberharcèlement. "Il est rapidement devenu évident que la détection des tendances suicidaires suffisamment tôt nécessite une recherche interdisciplinaire qui inclut des chercheurs de différents domaines. C'est ainsi que ce groupe multi-universitaire et pluridisciplinaire a été formé.”
Les chercheurs ont découvert que les personnes ayant de réelles tendances suicidaires utilisent rarement des mots explicitement alarmants dans leurs posts, tels que "mort", "tuer" ou "suicide". Le plus souvent, elles utilisent des mots descriptifs négatifs ("mauvais", "pire"), des termes injurieux, des expressions de détresse émotionnelle ("triste", "blessé", "pleurer", "fou"), et des descriptions d'états physiologiques négatifs ("malade", "douleur", "chirurgie", "hôpital"). Les personnes qui n'ont pas de tendances suicidaires expriment généralement davantage d'émotions et d'expériences positives, de références à la religion et de perspectives positives sur la vie - une corrélation qui rejoint de nombreuses études qui ont identifié ces facteurs comme représentant en quelque sorte une immunité face à la détresse mentale et émotionnelle.
Au total, les chercheurs ont analysé plus de 80 000 messages Facebook écrits par des adultes aux États-Unis, comparant leurs habitudes langagières avec leurs scores, selon un large éventail d'indices psychologiques. "La puissance de l'algorithme basé sur le traitement du langage naturel réside dans sa capacité à analyser d'énormes quantités d'indices linguistiques - ce que les humains ne sont pas capables de faire", a expliqué Refael Tikochinski.
La Professeure Asterhan a ajouté que "cette recherche a des applications très importantes pour identifier les personnes en détresse et leur apporter de l'aide à temps. En outre, elle démontre la force d'une collaboration multidisciplinaire intensive et de la combinaison de connaissances avancées issues des sciences sociales et des data sciences.
D'une part, l'utilisation de techniques informatiques sophistiquées a ouvert de nouvelles perspectives de recherche en sciences sociales. D'autre part, lorsque les connaissances et les données psychopathologiques ont été intégrées aux modèles informatiques, les taux de précision ont considérablement augmenté.”
Le Docteur Ophir a conclu "La percée que nous avons réalisée est capable de sauver des vies. J'espère que cette recherche est un signe d'espoir dans le domaine de la santé mentale".
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